Avant de nous juger

 

Glandeur, rêveur, profiteur, jamais content… autant d’a priori qui en disent long sur la perception des personnes sans emploi dans notre société. Parce que c’est toujours utile de vérifier ce qui se cache derrière des affirmations faciles, on décrypte pour vous quelques fausses vérités sur les réalités du chômage, de la précarité et du « hors-emploi ». Une campagne 100% maison imaginée par Aequitaz et le collectif Tenir le Cap, à base de répliques réellement entendues lors de repas de famille et assaisonnées par Vas-Y Paulette.

– « Les gens ne veulent plus bosser ! »
– « Avoir un boulot, c’est une question de volonté, si tu veux, tu peux ! »
– « Les chômeurs et les précaires nous coûtent un pognon de dingue !! » 

Toutes ces phrases, nous les avons entendues, au coin de la rue, au café, lors d’un repas de famille ou à la télé. Quand elles résonnent aux oreilles de celui ou celle qui vit le chômage, ce sont des mots qui blessent, qui indignent, qui donnent envie de répondre avec des témoignages de ce qui se vit au quotidien dans le chômage et la galère, mais aussi avec des données plus objectives qui remettent parfois les idées en place !

Y a-t-il du boulot pour tout le monde ?

Non, nous ne sommes pas « plus proche que jamais » du plein emploi. Au deuxième trimestre 2022, on comptabilisait 1 poste vacant pour 8 demandeurs d’emploi (cat. A) et 1 poste vacant pour 14 demandeurs d’emploi en élargissant aux demandeurs d’emploi au sens large.

« Je passe ma vie à me former, faire des stages et des démarches
dans tous les sens, envoyer des candidatures, mais je ne suis jamais retenue. »

« Le chômage est à son niveau le plus bas pour la deuxième fois depuis 40 ans » (Emmanuel Macron sur Twitter le 14 février 2023). Le gouvernement vante un niveau de chômage au plus bas depuis 1982 et communique sur le fait que le plein emploi (soit un taux de chômage ramené à 5%) serait « plus proche que jamais ». Il annonce un taux de chômage actuellement de 7,1%, représentant 2,2 millions de personnes, mais il faut regarder ces chiffres d’un peu plus près.

En plus de ces 2,2 millions de personnes, il existe ce qu’on appelle le « halo du chômage », c’est à dire un nombre important qui ne travaille pas ou pas suffisamment mais qui sont inexistants dans certaines statistiques, mais ces gens existent vraiment ! Ce sont des personnes sans emploi qui ne peuvent pas reprendre le travail immédiatement ou qui sont déjà en poste mais à temps partiel voir très partiel (parfois 4 à 6 heures par semaine) ou encore des personnes qui ne se seraient pas inscrites à Pôle emploi, des chômeurs en formation, en maladie ou ceux proches de la retraite qui ne recherchent pas activement un travail. On trouve également travailleurs indépendants comme les auto-entrepreneurs qui n’auraient pas ou peu d’activité et donc de revenu…

Si on intègre ces personnes, on se situerait davantage entre 12 et 20% de chômeurs soit entre 4 millions et 7,6 millions de personnes !

D’ailleurs, même le gouvernement le dit. Le rapport du mai 2023 qui introduit la réforme à venir de France Travail (futur nom donné au Pôle Emploi actuel) affirme : « France Travail a vocation à s’adresser à l’ensemble des personnes ayant besoin d’un emploi, soit 5,1 millions de personnes si on comptabilise l’ensemble des personnes de 15 à 64 ans qui ne sont pas en emploi auxquelles s’ajoutent 2,5 millions de personnes inscrites à Pôle emploi, et exerçant des activités réduites (catégories B et C de demandeurs d’emploi) ou en contrats aidés ou créateurs d‘entreprise (catégorie E) ».

Quelques ressources pour aller plus loin

Les gens ne veulent-ils encore travailler ?

Oui, les gens veulent travailler, mais l’accès à un emploi n’est pas si simple et parfois pas tenable en terme de conditions de travail.

« Je suis maman-solo, comme on dit. A la naissance de mon enfant j’ai du tout arrêté
ma formation auxiliaire de vie le permis que j’étais en train de passer.
Je pensais que ça allait être que pour quelques mois, que j’allais pouvoir trouver une place en crèche pour continuer mes études et pouvoir travailler. Mais non.
Aujourd’hui mon fils à 1 an et demi et je n’ai toujours pas de place en crèche.
Je vais devoir attendre qu’il rentre à l’école pour reprendre ma formation ou le travail. Au final, j’aurai perdu 3 ans de vie professionnelle, 3 ans à vivre avec le RSA , ce n’est pas bon pour lui non plus. »

« Je traverse la rue et je vous trouve du travail. » [Emmanuel Macron 15 septembre 2018 lors d’un échange avec un horticulteur de 25 ans sans travail.]. Pas aussi simple que ça, car la question est en réalité, quel travail ? Les difficultés d’accès à l’emploi sont très bien connues aujourd’hui. Tout d’abord, c’est le manque de personnes formées pour les postes disponibles et disponibles sur le territoire où l’on embauche. C’est pour cela que de nombreuses formations sont créées pour permettre aux gens d’accéder à des emplois proches de chez eux. Mais il y a aussi une question d’organisation des services publics ou des entreprises. Il n’est pas toujours possible de se déplacer pour rejoindre un boulot avec un véhicule personnel s’il n’y a pas de transport en commun, de faire garder son enfant a fortiori dans des horaires atypiques… Organiser un déménagement est encore plus complexe et coûteux.

Enfin, les conditions de travail rendent aussi l’accès à un emploi difficile : travail de nuit, les weekends, journées avec des horaires hachées, temps très partiels ou trop plein ou encore salaire au SMIC, mode de management brutaux… On parle de métiers difficiles, qui n’attirent pas et qui sont souvent difficilement tenables dans la durée pour mener une vie équilibrée et en bonne santé.

Quelques ressources pour aller plus loin :

Les aides sociales nous coûtent-elles trop cher (et sont-elles inefficaces) ?

Le budget de l’aide sociale n’est pas « dingue » et contribue à réduire les inégalités.

« Avec le RSA, on ne vit pas, on survit. »

« On met un pognon de dingue dans des minima sociaux, les gens ils sont quand même pauvres » (Emmanuel Macron à l’Elysée, discussion informelle 2018). Alors oui, mais non ! D’abord, ce qu’on appelle un pognon de dingue est tout relatif. D’abord, prenons le RSA (revenu de solidarité active). A l’origine, c’est un minimum social destiné à protéger les personnes qui se retrouvent à un moment donné de leur vie, sans aucun revenu. Le budget du RSA est de 15 milliards d’euros soit 0,75 point de PIB. Si on ajoute l’allocation adulte handicapé et les aides aux logements, on atteint les 2% du produit intérieur brut. Et tout cela permet de réduire l’intensité de cette pauvreté. En comparaison, le budget de nos retraites est de 331 milliards en 2020, soit 14,5 % du PIB.

Le RSA constituait en 2020 un socle de revenus pour 2,1 millions de foyers, soit plus de 4 millions de personnes avec les conjoints et les enfants à charge. Il protège donc un nombre très important de personnes en France. Son montant moyen avoisine les 7000 euros par an et par ménage bénéficiaire, ce qui en fait l’une des aides publiques les moins coûteuses par rapport à son impact social. D’ailleurs, avez-vous déjà vécu ou imaginer vivre avec 7 000€ par an ?

Son efficacité, elle est difficile à évaluer, c’est indéniable tant les facteurs de pauvreté et les leviers sont multiples. Mais une chose est sûre, on ne peut pas seulement regarder le taux du retour à l’emploi pour dire si ça marche ou pas. Il y a des bénéfices de cette aide sociale en matière de santé, d’accès aux droits, de situations familiales, etc. On pourrait se dire que si on n’avait pas cette politique, la société irait moins bien, car les inégalités seraient plus grandes et une part encore plus importante de la population aurait un moindre accès à la santé, à l’éducation, à l’alimentation, etc. Sans les prestations sociales, on aurait un taux de pauvreté dans la population de l’ordre de 22 % alors qu’il est réduit à 14 % par l’action des prestations sociales.

Pour aller plus loin :

Les chômeurs et les pauvres sont-ils des profiteurs ?

Les fraudeurs sont une très petite minorité en comparaison avec celles et ceux qui n’accèdent pas à leurs droits.

« Quand j’ai démarré ma recherche d’emploi, je n’avais droit à aucune indemnité chômage. Je n’ai demandé aucune aide. J’ai pris dans mes économies pour voir un coach. Pour moi, comme pour plein de gens, le RSA est vu comme un repoussoir. On n’a pas envie que la société nous juge. A court de finances, j’ai fini par demander le RSA, avec beaucoup de peur. »

« Si j’étais chômeur, je n’attendrais pas tout de l’autre, j’essayerais de me battre d’abord. »[Emmanuel Macron 18 février 2015 ministre de l’Économie de François Hollande]. C’est bien comme ça que ça se passe en réalité ! Rares sont ceux qui attendent tout de la collectivité, comme le prouvent les chiffres du non-recours, d’autant que les montants des allocations chômage et aides sociales ne sont pas suffisantes pour bien vivre.

Si nous allons regarder du côté de celles et ceux qui auraient droit à une aide sociale ou à des indemnités chômage et qui n’en font pas la demande, pour l’assurance chômage, c’est en moyenne 1 personne sur 3 qui fait « sans ». Parmi les inscrit.es à Pôle Emploi, seul.es 36% des gens touchent une indemnité chômage. Cette indemnité est en moyenne de 970€ net, soit en dessous du seuil de pauvreté.

Pour le RSA, on estime également qu’1/3 des personnes qui auraient droit au RSA n’en font pas la demande. Souvenons-nous également qu’à ce jour, la loi actuel dit que le RSA ne peut pas être versé à des jeunes entre 18 et 25 ans (sauf les jeunes parents isolés), ni aux étrangers dont le permis de séjour date de moins de 5 ans.

Le montant du RSA est de 607€ par mois pour une personne seule. Ce montant est calculé sur la base de tous les revenus du foyer. Tous les revenus complémentaires ou occasionnels (emplois, vacations, missions interim, aide financière d’un proche…) doivent être déclarés chaque trimestre. La vérification trimestrielle des revenus par la CAF permet de réévaluer le montant du RSA. En cas de contrôle supplémentaire, il faut notamment fournir tous ces relevés bancaires.

Même ajouté aux aides au logement, ce montant n’est pas suffisant pour vivre correctement. Les allocataires du RSA sont ainsi souvent obligé.es de solliciter des aides complémentaires comme l’aide alimentaire.

Quant à la fraude, elle se concentre en réalité sur une très petite minorité de bénéficiaires et est surtout le fait de certains réseaux organisés (qu’il faut évidemment combattre !). Selon la Cour des comptes, le montant cumulé des aides indues représenterait 3,2 % des prestations sociales. Il est aussi important de bien distinguer la fraude avérée de l’erreur de déclaration, dans un système réputé complexe et facétieux, à savoir l’interface numérique de la CAF. ATD Quart Monde a une expression très juste « La fraude des pauvres est en réalité une pauvre fraude ». C’est injuste de se voir sanctionné pour ne pas avoir déclarer une aide ponctuelle d’un membre de sa famille ou d’un ami. Le régime des sanctions pour les allocataires du RSA est déjà en soi très coercitif et produit beaucoup de stress, d’anxiété et de renoncement à ses droits face à tant de pression et de galères administratives. Claire Hédon, défenseur des droits a déclaré en mai 2023 : « Lutter contre la fraude sociale, c’est important mais il y a des erreurs et donc cette lutte contre la fraude peut éloigner des droits».

Enfin, pour regarder les chiffres avec objectivité, un rappel important :

  • La fraude aux aides sociales estimée = 1 milliard d’€ ;
  • La fraude aux cotisations sociales (des employeurs qui ne paient pas leurs cotisations = 7 à 8 milliards ;
  • La fraude fiscale (des particuliers et entreprises qui ne paient pas leurs impôts) = 80 à 100 milliards.

Laquelle devrait faire l’objet de la plus grande attention de la part des pouvoirs publics selon vous ? On vous laisse réfléchir !

Pour aller plus loin sur le non recours :

Pour aller plus loin sur la fraude sociale :

La discrimination à l'embauche, mythe ou réalité ?

Pour de nombreuses personnes victimes de discriminations, l’embauche ne va pas de soi, même quand des postes sont disponibles.

Il est plus facile de trouver du travail quand on a du réseau sauf que plus tu galères, plus tu es entouré.e de gens qui galèrent aussi.

Le problème c’est mon nom Karima. Il m’a toujours fermé des portes. J’ai 40 ans et c’est toujours aussi difficile de trouver du travail, malgré mon master et les nombreuses expériences que j’ai eu. J’ai longtemps travaillé à Berlin là-bas ça ne posait aucun problème. »

 

« Il faut que les employeurs ouvrent un peu leurs chakras » ?️ [Muriel Pénicaud @murielpenicaud ministre du Travail au micro de @SoMabrouk Nov 2019]. C’est bien comme ça que ça se passe en réalité ! Rares sont ceux qui attendent tout de la collectivité, comme le prouvent les chiffres du non-recours, d’autant que les montants des allocations chômage et aides sociales ne sont pas suffisantes pour bien vivre. C’est une phrase qui ne semble pas tout à fait prendre la mesure du défi lié aux discriminations à l’embauche en France. Elles sont désormais prouvées par plusieurs études. En moyenne, à qualité comparable, les candidatures dont l’identité suggère une origine maghrébine ont 31,5 % de chances de moins d’être contactées par les recruteurs que celles portant un prénom et nom d’origine française. 23 % des jeunes sortie en 2013 du système éducatif et dont les deux parents sont nés à l’étranger estiment avoir été victimes de discrimination à l’embauche lors des 3 premières années de leur vie professionnelle.
En 2021, le baromètre du défenseur des droits sur la perception des discriminations dans l’emploi était consacré à la jeunesse. Il constate que plus d’un jeune sur trois (37 %) rapporte avoir déjà vécu une situation de discrimination ou de harcèlement discriminatoire dans le cadre de sa recherche d’emploi ou de sa carrière. L’accès à l’emploi des seniors et des personnes en situation de handicap est également un enjeu clé, dans la lutte contre la discriminations à l’embauche.

Pour aller plus loin sur les discriminations à l’embauche :

Que font les chômeurs et les gens au RSA de leur journée ?

Une journée sans aller au boulot n’est jamais une journée sans rien faire.

« Il faut arrêter de voir les gens comme des fainéants, car une chose est sûre : personne ne fait rien pendant longtemps. C’est trop dur de ne rien faire. Personne ne survit émotionnellement à l’inactivité doublée de la solitude qu’elle engendre. »

« Nous sommes devenus une société tellement focalisée sur l’économique que tout ce qui est autre que du travail est devenu une catégorie vide, “la vie privée”. Mais en fait, c’est ça la vraie vie, la réelle catégorie […]. Nous devons prendre la responsabilité de ces besoins. C’est la tragédie de la condition humaine ». Joan Tronto, philosophe américaine

« Je préfère défendre une France du travail qu’une France des allocations » Fabien Roussel 23 novembre 2023 sur BFM TV. Ceux qui vivent avec d’autres revenus que ceux de leur emploi, doivent-ils être opposés à celles et ceux qui travaillent pour leur prétendue inactivité ? Une des manière d’interroger ce débat est de regarder plus précisément ce que font tous ces « inactifs » (au sens statistique) de leur journée ? Des tâches domestiques, l’éducation et le soin à leurs enfants, prendre soin d’un proche âgé, ou en situation de maladie ou de handicap (les aidants), du bénévolat, des tâches gratuites pour se rendre employable, des tâches pour vivre le mieux possible ou survivre avec trop peu d’argent et enfin des tâches pour prendre soin de soi quand ça va mal (maladie, dépression, accident..). Oui, mais dans quelle proportion à l’échelle de la population française ?

En effet, si on regarde la situation en France en 2010, les tâches domestiques représentent 42 à 77 milliards d’heures. Rapporté aux 38 milliards d’heures de travail rémunéré réalisées sur la même période, le temps de travail domestique est au minimum égal au temps de travail rémunéré. Si l’on retient la définition extensive, il en représente le double. De même, on estime que si l’activité parentale et domestique était déléguée à des professionnels, le PIB augmenterait d’un tiers.

En 2018, on compte également 9,3 millions d’aidants familiaux (dont 500 000 sont âgés entre 5 et 18 ans) qui soutiennent au quotidien 15 millions d’enfants et 5 millions d’adultes malades, en situation de handicap ou âgés. Selon plusieurs enquêtes, le bénévolat concerne près de 13 millions de Français et représente environ 680 000 équivalents temps plein. Les femmes sont sur-représentées dans toutes ces activités.

Impressionnant, non ? Ces quelques chiffres disent toute l’importance de changer de regard, quand on croise une personne au chômage, car une journée sans emploi n’a rarement à voir avec une journée de « glande ». Ensuite, cela pose des questions à notre système de protection sociale ? Pourquoi seul l’emploi donnent droit à une retraite, alors que d’autres formes d’activités comme aidant ou bénévole ne garantissent pas de ressources à l’âge de la retraite ? Pourquoi les formes de reconnaissance sont différentes alors que nombre de ces activités sont totalement vitales à notre société. C’est un sujet important sur lequel il est urgent de dépasser les clichés !

Pour aller plus loin :

Un boulot de dingue, reconnaître les activités vitales à la société, Rapport co-écrit par AequitaZ et le Secours catholique, septembre 2023 – A VENIR –

Delphine Roy, « Le travail domestique : 60 milliards d’heures en 2010 », étude Insee, 2012

« Les proches aidants en France », Drees, 2021, Infographie

Maud Simonet, « Et si on travaillait toutes et tous gratuitement ? », VidéoLes Idées larges, Arte TV, janvier 2022.

La place des femmes dans les activités du Prendre soin-Care, Joan Tronto : interview vidéo

Retrouver un boulot est-il le moyen de sortir de la pauvreté ?

Si l’emploi améliore les revenus par rapport aux seules aides sociales, l’emploi n’est pas aujourd’hui une garantie de sortie de la pauvreté.

« Mon salaire tourne autour de 1000€ par mois. Je commence à 7h15 avec une grand-mère de 98 ans, ensuite j’emmène quelqu’un faire ses courses ? Je retourne chez la dame pour le déjeuner pour lui donner à mange. Je grignote dans ma voiture sur le trajet car je dois emmener une autre personne faire ses courses. Après j’ai un creux et je dois coucher quelqu’un ? Je ne serai chez moi qu’à 20 heures. »

« Si j’arrête de travailler à 62 ans (âge légal du départ à la retraire) j’aurai 270€ de retraite, c’est même pas assez pour payer un loyer ».

Source Reportage Arte « Pauvre malgré le job, la souffrance des classes moyennes. » Janvier 2023

« La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler ». [Emmanuel Macron le 4 mai 2017 face a des militant CGT]. Cette affirmation laisse entendre que travailler permet d’accéder à un niveau de revenu décent. Or, c’est un peu plus d’un million de travailleurs qui vivent avec moins de 918 euros par mois selon les données 2019 de l’Insee. Avoir un emploi ne protège pas de la pauvreté, notamment pour ceux qui travaillent à temps partiel ou alternent des périodes de travail précaire et de chômage. Si on fixe le seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian (soit 1 102 euros par mois), on en compte 2,1 millions. Cela représente 8% des gens qui ont une activité professionnelle.

Le phénomène est aggravé pour les femmes. Selon un rapport d’OXFAM, entre 2006 et 2017, la part de femmes en activité professionnelle et pauvres est passée de 5,6 % à 7,3 %. Les mères de famille monoparentale sont particulièrement touchées par ce phénomène : parmi celles qui travaillent, plus d’un quart vivent sous le seuil de pauvreté, soit un million de femmes.

On parle aujourd’hui d’un halo du chômage, qui montre que les frontières entre le monde du travail et le monde du chômage sont devenues très poreuses, du fait des emplois précaires (interim, CDD, vacations, auto-entreprenariat) et du faible niveau de revenu de certains métiers. Par exemple, parmi les personnes au RSA, 16% travaillent, mais avec un niveau de revenu insuffisant, le RSA venant comme un complément de revenu.

Pour aller plus loin :

Article de l’observatoire des inégalités mai 2022 : Un million de travailleurs pauvres en France

Rapport OXFAM 2018 : « Pauvreté au travail : les femmes en première ligne »

Reportage vidéo Arte « Pauvre malgré le job, la souffrance des classes moyennes. » Janvier 2023

Film Debout les femmes, de Gilles Perret et François Ruffin sur le manque de reconnaissance dans les métiers du lien (bande annonce)

Tribune publiée par Nicolas Duvoux dans Le Monde sur le monde du travail et des prestations sociales, le 14 septembre 2022