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On a mal à notre protection sociale !

23 mars 2023
Cela fait plusieurs semaines que nous marchons dans les rues, rejoignant les cortèges déterminés et réjouis par la ferveur de ces moments de rassemblement. Avec les personnes des collectifs d’AequitaZ, on a installé des rituels autour de ces manifs de printemps. On a d’abord proposé un rendez-vous, pour marcher ensemble, doucement, simplement. Plusieurs sont venus, certains pour la première fois à une manif’. Et puis, entourés de gilets rouges, oranges, de drapeaux et de fanions à l’effigie des grandes centrales syndicales, qui n’ont toujours pas ou peu de section chômeurs et précaires, on s’est dit qu’il nous fallait fabriquer nos slogans, nos pancartes. Histoire d’avoir des idées sous lesquelles nous rassembler, d’avoir aussi notre place dans le cortège.
On voulait poser des mots sur nos maux : « On a mal à notre protection sociale ! », « La précarité ce n’est pas une carrière, des p’tits boulots à l’EHPAD c’est la misère.». «Je coûte un pognon de dingue ? 600 euros au RSA, 961 euros au minimum vieillesse. A peine de quoi survivre!». On ne marche pas uniquement pour les retraites. On pense aussi à la santé, aux aides sociales, à l’assurance chômage, à tout ce qui permet de tenir quand on a pas de boulot ou quand le boulot nous a abîmé.es.
Dans les cortèges, comme souvent, on s’est raconté des tas d’histoires sur le travail et sur le chômage. On a glané des soupirs, des sourires fatigués et des angoisses parfois. Avec Pauline, on a parlé de la pénibilité de son job d’ouvrière en maraîchage, boulot si précieux mais qui abîme le corps et qui fait dire aux gens comme elle : « je ne ferai pas ça toute ma vie ». Avec Béa et Hélène, on a causé de la précarité dont elles ne sortent pas, cantonnées dans des métiers du soin aux autres aux horaires découpés, des jobs mal payés, sans ressourcement ni formation professionnelle, avec ce CDD, cette vacation, ce salaire à la tâche, qui montre toujours que la fin est proche et qu’il va falloir « rebondir » une fois de plus. Avec Etienne, on a aussi discuté des démarches infantilisantes : « vous ne pouvez pas candidater seul, c’est votre conseiller qui doit le faire via la plateforme en ligne…». Et avec Rose, on a découvert d’autres problèmes avec la CAF, le manque de personnel pour traiter les dossiers et les règles injustes qui en découlent : « Suspension dite « préventive » de mes droits, j’ai été pendant 6 mois sans ressource »
Cette semaine, le 49.3 n’a pas éteint notre détermination à dire que tout cela est injuste et doit changer. Mais, nous avons désormais des groupes, des slogans, des idées, des valeurs que nous ne lâcherons pas. Finalement, il faudra bien nous entendre, entendre cette aspiration à vivre dans une société moins inégalitaire. Tout a déjà été dit sur la manière d’y arriver. Cela tient en deux qualités majeures : le courage et l’humilité. Ce courage et cette humilité, dont font preuve Pauline, Rose, Hélène, Etienne, Béa et tant d’autres en France, quand ils se lèvent chaque matin pour faire tourner la France, prendre soin des leurs ou guérir leurs maux. Puisse le gouvernement s’en inspirer et regarder le monde à partir de ce qu’il y a à faire, ici et maintenant : « prendre soin ».
En écho et en écoute, un très beau texte d’Orelsan : Manifeste